Viol : la difficile définition de l’absence de consentement
Véronique Pigeon avocate
15/02/2019
Selon l’article 222-23 du code pénal « Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui ou sur la personne de l’auteur par violence, contrainte, menace ou surprise est un viol.
Le viol est puni de quinze ans de réclusion criminelle. »
La Cour de Cassation vient de rendre un arrêt de principe qui vient préciser la notion de « surprise », notion difficile à cerner.
Jusqu’à aujourd’hui, la jurisprudence refusait de considérer comme victime d’un viol une personne qui se serait rendu compte a posteriori, une fois l’acte consommé, qu’elle s’était trompée sur le partenaire à qui elle avait accordé des faveurs. La surprise devait nécessairement résulter des moyens employés par l’auteur pour annihiler le consentement et non au sentiment d’étonnement et de stupéfaction consécutifs à un événement inattendu.
L’espèce qui a donné lieu à l’arrêt du 23 janvier 2019 (Chambre Criminelle n° 18-82.833) concernait un homme qui avait obtenu à plusieurs reprises des relations sexuelles en reproduisant le même scénario : après avoir attiré ses victimes par un faux profil sur un site de rencontre et sous prétexte d’un jeu amoureux, il avait avec elles une relation sexuelle en exigeant qu’elles aient les yeux bandés avant même de l’avoir vu. La désillusion était cruelle : l’Adonis était en réalité un « vieil homme voûté et dégarni à la peau fripée et au ventre bedonnant ».
La Cour d’Appel d’Aix en Provence avait réformé l’ordonnance du Juge d’Instruction ayant renvoyé le mis en examen devant la Cour d’Assises pour des faits de viol, estimant (en suivant une jurisprudence établie en ce sens)que la surprise ne peut être assimilée au sentiment d’étonnement ou de stupéfaction des plaignantes lors de la découverte des caractéristiques physiques réelles de leur partenaire.
Si le stratagème utilisé par l’homme pouvait incontestablement constituer un moyen pour amener les plaignantes à se présenter à son domicile…, elles avaient accepté d’avoir une relation sexuelle suivant un scénario élaboré par celui-ci, elles étaient capables d’analyser une situation pour le moins « originale » et le cas échéant, de s’y dérober, aucune contrainte ou menace sérieuse n’étant exercées contre elles.